Forum de prévention des addictions

… »Basculer dans l’addiction, c’est basculer dans une vie, où tout s’organise autour de l’alcool, de la drogue, du jeu ou des écrans. « …


Je crois sincèrement, que vivre sa jeunesse en 2019, est plus difficile qu’il y a 20 ans ou 30 ans. L’avènement des nouvelles technologies, ne remplace pas le délitement des liens sociaux, le sentiment d’isolement dans une société froide, violente, et bien souvent fermée à sa jeunesse. Les 15-25 ans doivent trouver leur place, et se frayer un chemin dans un environnement très compliqué, espace privé et espace professionnel confondus. Si vous ajoutez à ce contexte anxiogène, les caractéristiques de l’adolescence en forme de transgression, d’expérimentation, vous comprendrez que les addictions, peuvent devenir à risques. La parole est essentielle.

Dans nombre de témoignages, beaucoup de parents font le constat, qu’ils n’ont pas vu, ou pas su détecter les addictions de leurs enfants. De l’autre côté, les adolescents peuvent se murer dans le silence, s’isoler et, par mimétisme, ou sentiment d’appartenance à un groupe, plonger dans l’alcool ou la drogue. Pour faire comme les autres. Le lien social au cœur même des familles, se disloque alors à toute vitesse, entraînant au mieux une incompréhension, au pire des violences. Lors d’un forum précédent, un spécialiste des addictions, avait tenu à préciser la différence entre consommation excessive, et dépendance.

Basculer dans l’addiction, c’est basculer dans une vie, où tout s’organise autour de l’alcool, de la drogue, du jeu ou des écrans. L’adolescent commence alors à changer son emploi du temps, arrête des activités qu’il appréciait, pour ne plus assouvir que son addiction, laquelle devient une obsession, et le centre de sa vie. Il s’isole, change son quotidien et de comportement, autant de signes qui peuvent alerter, les parents, et le proche entourage.

C’est à partir de ce constat, d’une époque difficile, et du rôle crucial de la parole, et de l’échange, que j’ai décidé depuis trois ans, de mener une action de prévention des addictions. La Ville est pionnière en la matière, le chantier que nous avons ouvert, est novateur. L’enjeu est double : il y a la santé publique, et la sécurité publique, mais il y a aussi l’attention, et la vigilance des adultes, à l’égard de la jeunesse.

Le lien entre les générations, s’est lui aussi distendu, il s’agit de le renouer, sans juger, sans montrer du doigt, sans surplomber, mais pour être à l’écoute, et déjouer des pièges, que l’adolescent méconnaît.

Ce travail de sensibilisation, et d’éducation, qui s’inscrit à la fois dans le temps court, celui de la prise de conscience, et dans le temps long, n’aurait pu avoir cette résonance, sans la mobilisation de tous nos partenaires. Je tiens à les féliciter, et à les mettre à l’honneur : merci à Vie libre, la Préfecture du Rhône, la Police Nationale, la Ligue contre le cancer, Avenir santé, à Kéolys, à l’association Prévention routière, à tous nos services et équipements, la police municipale, le BIJ, le Point Accueil Ecoute Jeunes, notre Médiathèque, etc. Non seulement, tout le monde joue le jeu, mais tout le monde s’investit, pour que la jeunesse vénissiane, vive mieux son passage de l’enfance à l’âge adulte. C’est une période fragile, on le sait, mais aussi foisonnante et passionnante, tant tout est à découvrir.

L’Education Nationale occupe une place centrale, dans ce dispositif, et il faut saluer le travail mené dans trois collèges de notre ville, Paul Eluard, Jules Michelet et Elsa Triolet. Les actions de sensibilisation, ont eu lieu tout au long de l’année, auprès de trois classes de 20 élèves chacune. Idem dans les EPJ Parilly et Charréard, avec des thématiques sur la drogue, l’alcool, et le cyber harcèlement. Les productions finales, clip, slam, pièce de théâtre, font l’objet d’une présentation au cours de ce forum. Le thème des addictions aux écrans, et aux réseaux sociaux est au cœur des créations.

Un choix judicieux, quand l’actualité vient nous rappeler si régulièrement, les risques des nouvelles technologies. Leur avènement ne pose pas problème, peut même être source d’enrichissement, c’est leur utilisation ,qu’il convient d’encadrer, et d’accompagner. Tout écran confondu, console, internet, smartphone, l’exposition cumulée à un écran, au cours de la journée, est en moyenne de 5,8 heures à 11 ans et de 8,4 heures à 15 ans ! La place que l’image occupe dans la vie quotidienne des adolescents, est devenue omniprésente. Les études scientifiques, sont dans leur très grande majorité, unanime à dire qu’une surexposition aux écrans, peut perturber le développement cognitif des jeunes enfants, âgés de 0 à 3 ans. Des troubles du langage, ont été par ailleurs signalés. Pour les adolescents, ces surexpositions provoquent des troubles du sommeil, des replis sur soi, des temps de concentration beaucoup plus courts.

Sur internet, l’accès à la pornographie, est de plus en plus précoce. L’âge moyen, du premier visionnage d’un film X, se situe autour de 14 ans. Des chercheurs mettent en garde, sur les effets dévastateurs de la pornographie, notamment sur la psychologie des enfants, et adolescents, et sur leur sexualité ultérieure. La représentation de la femme, entre femme objet, ou fille facile, y est altérée, déformée, et les rapports filles-garçons s’en trouvent modifiés, plus violents, et plus âpres.

La révolution du numérique, dont on ne mesure pas encore assez les effets, sur le développement de la personne, faute de recul, s’ajoute donc à d’autres addictions, qu’on pourrait qualifier de plus classiques, mais dont les conséquences sont graves, pour la santé du jeune, et pour l’entourage familial.

La consommation excessive d’alcool, ou de drogues, peuvent avoir des résonances sur l’ordre public, mais aussi briser la vie des jeunes, ou de leur entourage. La France, est le pays européen où la consommation de cannabis, reste la plus élevée, notamment chez les jeunes. Loin d’être une drogue douce, et festive, le cannabis entraîne des dommages physiques et cérébraux, rend les consommateurs justiciables, et responsables de la persistance des réseaux d’économie souterraine, provoque régulièrement des drames.

Notre devoir de sensibilisation, sur les risques encourus, notre vigilance à l’égard des jeunes, et notre capacité à prévenir, et détecter les comportements dangereux, forment autant d’étapes pour lutter contre les addictions. Libérer la parole, est un préalable nécessaire et essentiel. Nos politiques de proximité, pour l’accès des plus jeunes au sport, à la culture, jouent elles aussi un rôle de garde-fou, et contribuent au renforcement du lien social. Un contrepoids à l’isolement, un antidote aussi, au sentiment de solitude que de nombreux adolescents éprouvent.

Ce forum de prévention des addictions, dont c’est la 4ème édition, montre toute son utilité, dans un siècle pour le moins tourmenté, où les repères sont aussi fragiles, qu’évanescents. Notre ville a fait preuve d’innovation, a été pionnière en France sur ce thème, de l’adolescence et des dépendances, alors il nous faut, comme aujourd’hui, continuer le travail entrepris. Car c’est ni plus ni moins, l’avenir des jeunes, dont il est question.

Je vous remercie.

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